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Contributions individuelles

État des lieux

Nous allons, collectivement, de crise en crise. Crashs boursiers, crises sociales, crises énergétiques, crises écologiques, guerres, etc. Pour qui a lu Marx, la chose est entendue : le capitaliste ne se survit qu’ainsi. Il ne saurait en être autrement pour un système idéologique qui violente toute réalité matérielle élémentaire et de l’exploitation de l’homme par l’homme décline ces dangers constants qui font, du plus grand nombre, des victimes inutiles. Il n’y a pas de fatalité cependant, car la réalité peut emporter toute idéologie comme le vent fait sombrer un navire.

À l’heure où nous parlons, c’est une crise sanitaire qui vient s’ajouter à d’autres… Si nous analysons la « gestion » (je reprends ce mot couramment employé bien que détestable) de cette dernière : elle est catastrophique. Et pour cause ! Les quelques uns qui volent notre force de travail ne vont pas, du jour au lendemain, faire preuve du moindre sens de justice. Il est évident que leur seule priorité est de voir la machine économique reprendre selon les mêmes modalités. S’il n’y avait pas de rapports de force, il est clair qu’il nous serait imposé de maintenir ce système en l’état, dès aujourd’hui, au péril de nos vies. Les hésitations, les « injonctions paradoxales » du gouvernement ne reposent pas sur de quelconques états d’âme. Ne nous ne y trompons pas : c’est bien parce qu’il craint un mouvement de révolte massif qu’il tergiverse à la marge. S’il avait les pleins pouvoirs et les moyens objectifs pour les conserver durablement, il en serait fini de nos droits et nous irions au « casse-pipe » sans garantie sanitaire et sociale, pour la simple sauvegarde de leurs privilèges, fruits pourris d’un vol caractérisé.

Seulement voilà, cette crise prouve, s’il était besoin, que la richesse n’est pas produite par les propriétaires de capitaux, mais par nos corps et nos cerveaux. D’autre part, jamais il n’est apparu aussi évident que la logique du marché imposé aux services publics était, non seulement une aberration de fait, mais un acte criminel. Justement, fin 2018, femmes et hommes se sont révoltés pour plus de justice et de démocratie ; et ceux d’entre eux qui prévenaient les « épargnés » que leur tour viendra ont prouvé leur clairvoyance. Les gouvernants et leurs alliés financiers ont pris peur et s’en sont suivis : mises en place de moyens de coercition, armement massif de la police, mesures judiciaires iniques, menaces et chantage. Nul n’ignore qu’un peuple politisé est en mesure de renverser un système politique à l’idéologie spoliatrice et liberticide. La monarchie est tombée. Aujourd’hui, la bourgeoisie, assise sur les places prises à la noblesse, craint tout logiquement que son tour ne vienne.

C’est bien de cela dont il s’agit. Le reste est bavardage. Au sortir de cette nouvelle crise, femmes et hommes vont se retrouver dans un état de détérioration sociale pire encore qu’il y a un an ou deux. Le chômage va s’amplifier ; et pour les intérimaires, pour les auto-entrepreneurs, pour ceux réduits aux minima sociaux, pour ceux réduits à accepter des travaux non déclarés la question de la survie est là, d’ores et déjà.

Des secteurs entiers sont ou seront au bord de l’explosion… Qu’on me permette une digression à propos d’un secteur qui est le mien : le circuit du livre. Combien de librairies vont-elles mettre la clé sous la porte ? Et donc, combien d’éditeurs ? Que dire des diffuseurs-distributeurs avec leurs équipes commerciales, logistiques, les personnels des entrepôts ? Que dire des imprimeurs, etc. ? Et je ne parle pas du sort des auteurs, qui selon le mode d’exploitation, sont les moins rémunérés de toute la chaîne… Bref, chacun pourra décliner cette situation dans le secteur qui est le sien.

La colère est là, la détestation de Macron et du gouvernement Philippe est là. Le personnel hospitalier, déjà en lutte depuis plus d’un an, est motivé comme jamais. Il exige que s’ouvrent des lits, que du personnel soit embauché, des moyens légitimes débloqués… De toute évidence, il y aura une nouvelle explosion de colère dès que les circonstances le permettront. Chômeurs, travailleurs ayant vu reculer leurs droits – confiscation de leurs RTT, congés payés, etc. –, les plus précaires et tous les personnels des services publics, dont les droits ont fondu comme neige au soleil, ne seront pas tous résignés, la chose est certaine.

Alors, il ne faudra pas réclamer à « nos seigneurs », non, on ne négocie pas avec ses bourreaux, on les chasse. Rappelons-le sans cesse : pas d’aumône ! Non, la restitution des richesses que nous produisons et rien d’autre. Ce ne sont pas des revendications idéologiques, mais la raison même. Les idéologues, faut-il le rappeler, ce ne sont pas les exploités, mais les exploiteurs qui, sans « appareils idéologiques d’État » (police, médias, etc.), ne tiendraient pas une semaine. Sans leur propagande et leur violence légale, ils seraient déjà à genoux.

Alors, travaillons, partout où nous le pouvons – CNRR, assemblées populaires, syndicats – à nous organiser politiquement. À faire en sorte que nous ne rations pas la prochaine occasion (elle viendra !), que l’on soit en capacité de contredire le « il n’y a pas d’autre alternative ». Les masses se remettront en mouvement, ici comme ailleurs, et elles auront aussi besoin d’alliés. Citons Marx à nouveau : « la classe et ses alliés » ; car n’oublions pas qu’une partie de la bourgeoisie peut être en capacité de « penser contre elle-même » ; des nobles ont participé à 1789. Nous aurons besoin du plus grand nombre.

Que « l’émancipation des travailleurs soit l’œuvre des travailleurs » et qu’une conscientisation politique s’élargisse encore et encore, pas moins. Parce que les idéologues savent très bien s’entendre entre eux, et diviser les exploités par nationalité ou culture leur convient à merveille, que le fascisme soit dénoncé partout comme une solution acceptable pour les détenteurs de capitaux. Là encore, contre toute raison et toute humanité.

L’enjeu est bien celui-ci : être enfin des êtres humains et non des agents, souvent à notre corps défendant, de la barbarie.

La socialisation de ce qui assure la survie matérielle de tous, le renforcement et le déploiement des services publics, sont le minimum, c’est à notre portée.

Que la révolte devienne révolution, partout. Ça peut être demain.

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